Pour ce dimanche 22 juin 2025, Rolland et Yves Fassino nous avaient concocté un beau programme : une sortie dans un lieu assez fantastique, au centre des Alpes du Sud : le col de Larche, situé en lisière du Parc du Mercantour à l’altitude de presque 2000 m, et juste à la frontière franco-italienne (commune nouvelle de Val d'Oronaye). Malheureusement Rolland n’a pu assurer l’encadrement du jour, à la suite d’un assez gros pépin physique. Nous lui souhaitons un prompt rétablissement.
J’ai donc pris le relais pour guider les 6 participants sur le terrain, après un entretien téléphonique avec Rolland pour discuter des points à visiter. Et on s’en est pas mal sortis, avec un petit supplément personnel dans la vallée en fin de journée.
Départ du parking bondé du col de Larche vers 10 h 30 en direction du nord. Tout de suite les prairies humides nous révèlent de nombreux Dactylorhiza cruenta encore bien fleuris. Nous suivons un sentier montant dans la pente pour chercher une espèce très rare, le Dactylorhiza lapponica. Les prairies pentues recèlent divers taxons classiques : Gymnadenia conopsea et Traunsteinera globosa sont les plus nombreux ; Gymnadenia corneliana et Coeloglossum viridis se font vraiment discrets, est-ce la hauteur de l’herbe qui nous les cache ?
Arrivés sur le point GPS nous indiquant les D. lapponica, on a beau fouiller, aucun Dactylorhiza en vue. On redescend vers une petite colline où quelques Platanthera fornicata et G. corneliana sont bien fleuris. Je nomme ici fornicata les Platanthères de type « bifolia » qui ne sont pas situés sur des suintements humides et des terrains acides. Vu aussi 2 pieds d’Orchis ovalis fanés.
Tiens, on a perdu Virgile. Il est resté en arrière pour explorer la pente, et tout d’un coup il nous appelle au loin. On remonte le dénivelé qu’on vient juste de descendre, mais cela vaut la peine : sur un petit replat situé autour d’une source, une belle population de Dactylorhiza est bien fleurie. Ce sont des Dactylorhiza du groupe majalis, mais tout de suite nous remarquons la présence de 2 groupes de plantes : au milieu du replat, les classiques D. alpestris, habituels à cette altitude. Les inflorescences sont bien fournies, le labelle bien étalé, les feuilles sont nombreuses (4-6), avec les inférieures bien ovales. Sur l’extérieur du replat près du ruisseau, 5 exemplaires attirent notre attention : inflorescence pauciflore (une dizaine de fleurs), lâche, le labelle est fortement plié, les feuilles peu nombreuses (3), étroites : ce sont bien là les caractères de notre recherche du jour, Dactylorhiza lapponica. Et une coche ! Comme le fait justement remarquer Virgile, nos amis transalpins du GIROS le nomme D. rhaetica (synonyme D. lapponica subsp. rhaetica), mais les différences avancées entre les 2 taxons ne semblent pas suffisantes pour en faire une espèce à part entière. On trouve aussi sur ce site un unique exemplaire de Neottia ovata, à 2 050 m, toute petite, effet de l’altitude ?
On re-redescend vers la route, et au bord de celle-ci, parmi les Dactylorhiza cruenta assez nombreux, on trouve 2 choses intéressantes. Tout d’abord 3 exemplaires de la variété hyphaematodes du Dactylorhiza incarnata, c’est-à-dire des plantes aux feuilles entièrement teintées de pourpre des 2 côtés. Ensuite, tout près de 2 Dactylorhiza alpestris isolés parmi les D. cruenta, nous découvrons un bel hybride entre les 2, qui ne semble pas avoir été décrit.
Fin de la matinée vers 13 h 30. Nous prenons notre pique-nique en Italie, sur une butte surplombant une zone humide à D. cruenta, tout à côté d’un des nombreux monuments à la gloire de Fausto Coppi. La zone n’est malheureusement pas très calme le week-end en raison du va-et-vient incessant des motos, autos et camping-cars qui se croisent au col par centaines…
Après le repas non entamons la visite du côté sud du col, en longeant plus ou moins la frontière franco-italienne. Un panneau nous indique que nous rentrons dans le Parc du Mercantour.
Au début la flore est assez semblable qu’en face, avec de très nombreux Gymnadenia conopsea et Traunsteinera globosa, peut-être moins avancés en floraison, tout comme les Gymnadenia corneliana. Hélène nous trouve une nigritelle toute rouge, mais ce n’est pas le G. austriaca espéré : il s’agit de la forme bourneriasii de G. corneliana…Beau et rare quand même ! On rencontre aussi quelques rares Coeloglossum viridis et Platanthera fornicata.
Enfin un grand replat nous livre quelques merveilles : Dactylorhiza cruenta par dizaines, 2 D. fuchsii, 1 var. hyphaematodes, et surtout plus d’une douzaine de Dactylorhiza lapponica, en présence ici d’un seul exemplaire de D. alpestris. La différence est encore plus flagrante que ce matin : cette espèce est vraiment bien caractérisée dans cette zone.
Nous revenons au parking vers 16 heures : il est bien trop tard pour s’engager dans le Vallon du Lauzanier jusqu’au Pont Rouge, une autre zone que nous a indiquée Rolland. Je propose de redescendre dans la Vallée vers Jausiers, sur le chemin du retour, et de visiter une zone que j’avais explorée la veille à la recherche du Sabot de Vénus, en vain.
Dans un petit bois en lisière de l’Ubaye, nous tombons tout d’abord sur quelques Epipactis distans bien caractéristiques, déjà fleuris. Plus loin nous verrons 3 E. helleborine en bouton, entourés de nombreuses jeunes pousses : la différence est nette au niveau des feuilles et de l’état de floraison, comme on a pu le remarquer ce week-end par ailleurs. Vu aussi quelques hampes d’E. helleborine var. minor.
Comme je montre au groupe un D. fuchsii vu la veille (d’une hauteur respectable d’1 m !), Christian nous fait remarquer à trois pas de là : est-ce qu’on ne dirait pas des feuilles de Sabot ? Et bien oui, c’est effectivement une touffe de 11 pieds non fleuris cette année, avec une capsule sèche de l’année dernière en prime. Comme quoi un groupe est bien plus performant ! Autres espèces présentes : Neottia nidus-avis et Neottia ovata, bien plus grandes que l’exemplaire de Larche. Puis nous avons la surprise de trouver un exemplaire un peu mal formé de Limodorum abortivum : nous somme à 1 255 m d’altitude, peut-être un peu haut pour lui (bien que Bruno nous en ait montré l’année passée à 1 900 m du côté d’Arvieux). Enfin pour terminer, quelques Platanthères encore fleuris montrent une nette différence avec ceux de Larche : éperon bien plus long et retombant (au moins 3 fois la longueur du labelle), labelle plus long et étroit … Nous sommes sur des alluvions de l’Ubaye qui proviennent de l’amont, dont certaines parties sont siliceuses : est-ce le « vrai » Platanthera bifolia ?
Fin de la sortie vers 18 heures. C’est vrai qu’on n’était pas nombreux, l’éloignement du point de rendez-vous sans doute, mais les absents ont encore une fois eu tort. La journée fut belle tant pour les espèces rencontrées que pour le climat (soleil et quelques nuages, une légère brise, un peu de frais ne fait pas de mal ces jours-ci). Merci à tous les participants.
Espèces rencontrées :
Coeloglossum viridis 2 stations
Cypripedium calceolus 1 station
Dactylorhiza alpestris 2stations
Dactylorhiza cruenta 3 stations
Dactylorhiza fuchsii 2 stations
Dactylorhiza incarnata var. hyphaematodes 2 stations
Dactylorhiza lapponica 2 stations
Epipactis distans 1 station
Epipactis helleborine 1 station
Epipactis helleborine var. minor 1 station
Gymnadenia conopsea 2 stations
Gymnadenia corneliana 2 stations
Gymnadenia corneliana f. bourneriasii 1 station
Limodorum abortivum 1 station
Neottia nidus-avis 1 station
Neottia ovata 2 stations
Orchis ovalis 1 station
Platanthera bifolia 1 station
Platanthera fornicata 2 stations
Traunsteinera globosa 2 stations
Hybride rencontré :
X Dactylorhiza alpestris X cruenta 1 station
Quelques photos prises durant la sortie :
La traditionnelle photo de groupe :
Liste des participants :
BLAIS Pierre-Michel & Hélène (Entrecasteaux 83) Organisation avec Rolland & Yves FASSINO
FLEURY Christian (SFO LR)
GAZZANIGA Virgile (Curbans 04)
MERCIER Gérard & Evelyne (Embrun 05)